Archives mensuelles : Mai 2019

Nourriture-récompense, Nourriture-punition

La nourriture possède bien d’autres attributs que celui de nutrition. Une des plus courantes est la nourriture-récompense.

Celle avec laquelle on manipule les enfants pour qu’ils finissent leurs assiettes, par exemple. Sans se rendre compte que, ce faisant, on fait comprendre à l’enfant que la nourriture principale (légumes, grains, viandes) n’est pas si « bonne » que ça puisqu’on doit se force pour en manger pour finalement avoir le « droit » au dessert. Cela met aussi l’emphase sur le sucre comme étant désirable, spécial et et attrayant.

Oui, il fût un temps où le sucre était réservé aux classes sociales riches et où la chanson disait « Donnez bons parents, du sucre aux enfants » (Dame Tartine). En élevant le sucre au rang du privilège  , nous mettons en place un cercle vicieux qui accorde au sucre des supers-pouvoirs: récompense, plaisir, rituel mais aussi interdits et culpabilités. En mettant les sucreries à part, en les associant à spéciales et rares, nous en faisons un icône qui semblent combler nos insatisfactions, nos manques relationnelles (une sortie à la crèmerie pour remplacer une présence parentale déficiente, par exemple), nos besoins de reconnaissance et d’appartenance.

Mais comme ce même sucre est aussi diabolisé, reconnu comme mauvais pour la santé, faisant grossir, déréglant l’insuline et nourrissant les cancers, nous voilà maintenant prises dans un engrenage terrible: la même nourriture qui nous fait plaisir nous fait du mal.

Nous sommes attirées par ce qui est « mal », « mauvais » et par extension, quand nous en mangeons nous faisons quelque chose de mal. Alors la nourriture devient punition et source de stress. Nous nous punissons avec des légumes au lieu de les apprécier. Nous punissions notre corps avec de l’exercice forcé et sans plaisir quand nous avons « fauté » avec un aliment défendu. Nous nous détestons après avoir « succombé » à la tentation d’un gâteau ou d’une pâtisserie.

La culpabilité entre en scène, la peur aussi. Et le fruit défendu précipitera notre chute… et la nourriture se change en religion.

Il est temps de sortir de notre folie individuelle et collective. La nourriture, intrinsèquement, n’est ni bien ni mal. Elle n’est pas « morale ». Elle n’indique pas notre valeur personnelle, notre capacité à nous contrôler, notre intelligence, notre supériorité faces aux autres, ou notre volonté.

Chaque mode alimentaire attaque l’un ou l’autre de nos macronutriments essentiels: sucres, gras ou protéines…leur attribuant à tour de rôle la responsabilité de tous les maux, méfaits et désordres alimentaires.

Soyons saines d’esprit et de corps.

Mangeons de tout avec modération et avec plaisir. Que le dessert ne soit plus l’apothéose d’un repas, ni son apocalypse. Que l’on retrouve le plaisir de toute la nourriture: des légumes aux protéines, de la salades aux grains, des fruits au féculents, de l’entrée au dessert.

Quand la nourriture cessera d’être un enjeu trop émotionnel, nous serons en mesure d’entendre ce que notre corps nous dit, ce qu’il nous réclame, ce dont il se passerait bien.

Que nos changements alimentaires soient faits dans la tranquillité, dans le plaisir, dans la bienveillance envers nous-mêmes et non dans la peur, le stress, la privation et l’obligation.

Oui, je vous le dis, c’est tout à fait possible!

Une relation intime

De nos jours il est une relation qui est encore plus intime et tabou que le sexe, l’argent ou la politique. Plus sensible, plus intérieure et plus cachée que bien des fantasmes qu’on étale au grand jour, j’ai nommé:  la relation à la nourriture

Oui, on parle de nos diètes et du dernier régime à la mode (en ce moment le cétogène côtoie le véganisme)…mais parle-t-on du sentiment de privation que beaucoup d’entre-nous vivons chaque jour? De notre insatisfaction par rapport à notre image corporelle? De notre peur de n’être pas à la hauteur par ce que notre corps est non-conforme? De la peur que notre partenaire se détourne de notre corps imparfait ou vieillissant? De notre manque d’amour, de contact et de sensualité que l’on remplace par de la nourriture? De la perte de jouissance de la vie à manger des aliments diététiques? De notre envie d’être enfin libérée des contraintes de la nourriture? De nos fantasmes de pouvoir manger sans restriction? De toute la plac eque prend la nourriture dans nos pensées?

Cette femme qui salive intérieurement en regardant son compagnon manger des frites alors qu’elle-même mange sagement sa salade ou son poisson vapeur?

Celle qui se cache pour prendre quelques biscuits dans la boîte le soir, quand personne ne regarde; celle qui se cache une deuxième boîte de biscuits juste pour elle, afin que personne ne remarque qu’elle en mange…comme une alcoolique cache ses bouteilles.

Celle qui n’arrive pas à manger quand elle est seule…et cet autre-là pour qui c’est l’inverse.

Celle qui fait deux épiceries, une pour sa famille et une pour elle-même. La seconde étant moins appétissante que la première.

Celle qui refuse les invitations au restaurant parce qu’elle a peur de la nourriture alors qu’elle dit qu’elle préfère ce qu’elle cuisine elle-même.

Celle qui sourit, pleine d’enthousiasme et de bonne humeur, qui mange à peine parce qu’elle n’ a pas faim et qui, le soir, ne se retient plus devant le gros sac de chip et le pot de crème glacée.

Celle qui mange debout, dans sa voiture, dans la salle de bain, en faisant le repas pour les autres.

Celle qui se punit et se récompense avec la nourriture, comme elle l’a vécu enfant.

Même sans parler de maladie alimentaire comme l’anorexie, la boulimie ou l’orthorexie, chacune d’entre nous porte une relation intime avec la nourriture qui parle de cette relation intime qu’elle a avec elle-même.

Et comme toute relation très intime, il est difficile d’en parler, de partager sur ces sujets alors même que nous sommes bombardées et submergées par des infos nutritionnelles tout le temps, partout.

Comment en sommes-nous venues là? Parce qu’un virus se promène depuis des décennies et reste bien ancré dans nos croyances. Un virus pernicieux et pervers qui nous fait croire que nous sommes responsables, par la nourriture, de la forme de notre corps; qu’il faut rester en contrôle face à cet ennemi sournois qu’on appelle l’appétit et qui pourrait nous faire perdre l’amour et la considération d’autrui et de nous-mêmes; qu’il n’y a rien de mieux qu’une volonté de fer pour mater ce corps et ses envies…bref, un virus qui nous rend très malade et fait faire beaucoup d’argent à des gens qui ont tout intérêt à briser cette relation  la nourriture qui pourrait être saine, naturelle et sans histoire. En brisant notre relation sacrée avec la nourriture, cette nourriture qui est, chaque fois, l’affirmation de notre relation à la Vie, notre relation au Féminin Sacré Nourricier est si malmenée que peu de femmes et d’hommes en réchappent.

Sauver la planète, la nature, l’environnement, la vie en nous et autour de nous, doit premièrement passer par renouer profondément, viscéralement, avec bonheur et gratitude, à notre corps et à ce qui lui permet de continuer d’exprimer la vie sur cette terre.

Guérissons notre relation à la nourriture et nous serons en voie de guérir notre relation à la Terre-Maman.

L’exercice ou le mouvement?

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On le sait et on se le fait répéter ad nauseam: il faut faire de l’exercice régulièrement. Pour être en bonne santé, pour perdre du poids, pour être moins dépressive, pour bien vieillir, pour être moins sédentaire, pour nos articulations, notre coeur et tout le reste.

Mais voilà, nombre d’entre nous faisons de l’exercice par obligation, par devoir, pour nous donner la permission de manger, pour nous punir d’avoir trop mangé, parce qu’on nous a dit que c’était bon pour nous, par peur de mal vieillir, parce que nous avons mal quelque part, parce que nous nous trouvons trop grosses pour nous mettre en maillot cet été…

Et comme pour les régimes, l’exercice est vidé de son sens et surtout du plaisir que le mouvement apporte réellement au corps. Il devient une tâche supplémentaire parmi d’autres et qui devient lourd au bout d’un moment. Alors on flanche, on réduit nos visites au gym et on se sent coupable…

Il se trouve que notre corps est fait pour le mouvement, par forcément pour l’exercice. L’exercice est une forme codée, parfois très rigide, de mouvement. Il suit des règles très précises et un temps donné. En ce sens, c’est une approche plus masculine du mouvement, qui cherche à remplir une fonction précise pour atteindre un but particulier.

Le mouvement est plus naturel. Regardez faire les bébés qui donnent des coups de pieds frénétiques; les petits qui se traînent sur leurs fesses; les enfants qui essayent toutes sortes de culbutes…le mouvement n’obéit à aucune règle préétablit. Sa limite est celle de la capacité du corps et de l’envie du moment.

Le mouvement procure du plaisir bien avant l’arrivée de l’endorphine des coureuses. Il est joie, car il est la vie qui circule en nous, sans cesse en action. La vie, même au repos, est mouvement.

Le mouvement procure de l’énergie car il nous permet de sortir de nos raideurs en laissant libre cours à notre corps trop souvent contraint. Bouger est alors bien plus efficace que faire de l’exercice, car il recours à la sagesse de notre corps. Notre corps sait bouger quand on lui laisse l’occasion d’être le maître à bord; quand nous écoutons où et comment il a envie d’aller.

Laissez-vous aller. Sautillez, étirez-vous pleinement dans votre lit, sautez une marche de temps en temps en sortant de chez vous, montez les marches du bureau en faisant des petits pas de côté, dansez en faisant la cuisine, trémoussez-vous en remplissant le lave vaisselle, allez dans l’eau pour sentir à quel point vous pouvez bouger différemment quand votre corps est soutenu…amusez-vous à piquer une petite course sans stress, pour le plaisir de vous essouffler un peu (oui, oui, ça peut être très plaisant de s’essouffler!). Retrouvez la joie de votre en corps en mouvement. quelque soit votre forme physique, vos handicaps, votre poids, votre image corporelle.

Laissez l’exercice de côté si vous le faite dans la contrainte, l’obligation ou la punition.

Bougez votre corps d’une façon qui vous fait plaisir et respecte vos limites. Soyez comme l’eau qui se meut simplement, dans toutes les directions possibles et contourne toute résistance.

Vous verrez, vous y prendrez goût et vous vous surprendrez à vouloir en faire plus, juste parce que le mouvement, c’est bon!